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(Verbe 1)(Siècle à préciser) De l’occitan badar (« regarder bouche bée ») ou de l’ancien français bader (« ouvrir, être ouvert (pour qualifier une brèche dans un mur), se borner à attendre, attendre en vain, aspirer, regarder avidement la bouche ouverte, convoiter, avoir de mauvaises intentions ou de fortes envies, rêver ») , attesté au XIIe siècle dans des versions de la Chanson de Roland. Ce sont deux verbes polysémiques provenant du verbe latin commun intransitif badare signifiant d’abord d’un point de vue physiologique (« bâiller, avoir la bouche grande ouverte et aspirer/inspirer par réflexe ou conditionnement du bâillement ») mais aussi au sens figuré (« attendre (trop longtemps ou en vain), ouvrir une muraille ou un mur ») par emploi parallèle au latin vulgaire batare. L’évolution occitane plus conservatrice a laissé en français moderne badaud (badau en provençal) et le verbe badauder. L’évolution en langue d’oil subsiste avec les variantes baer, baier, beer attestées en ancien français, elle nous a laissé le vieux verbe bayer (avec l'expression bayer aux corneilles, le verbe béer et son participe présent béant, et son participe passé beée aujourd'hui altéré en bée, et les adjectifs parfois substantivés ébahi, bégueule (= bée gueule). L’interprétation des mots badin, badiner, badinage parfois reliés à cette famille pourrait s’expliquer par l’ancien français baldiner (« égayer, enhardir »), en postulant une évolution transitoire méridionale, en domaine occitan.
(Verbe 2) De l’ancien français bader (« bavarder »), encore utilisé en Touraine et en Normandie.
(Verbe 3)(XXIe siècle) De l’anglais bad, mal, mauvais, avec le suffixe -er ou par péjoration récente du verbe bader, gardant d’ailleurs un sens secondaire ancien de futilité, d’inutilité, d’attente vaine ou de bêtise profonde caractérisant l’existence humaine.
(Occitanie) Regarder bouche bée, c’est-à-dire la bouche ouverte, parfois avec étonnement ou admiration ; contempler avec admiration ou envie[1][2]. — Note : À l’origine il s’agit d’un verbe intransitif, l’attitude passive et prolongée étant une marque de niaiserie ou de sottise. Les formes transitives récentes manifestent également une péjoration indéniable.
Et chaque fois que j’allais chez le coiffeur, je badais, sourit-elle.— (journal 20 minutes, édition Paris-IDF, 24 novembre 2023, page 8)
Je n’ai point besoin de fier-sot à bader la goule devant chez moi !— (Georges Coulonges, Les sabots de Paris, Presses de la Cité, 2003 ; édition utilisée : collection Pocket, 2005, page 106)
Et pendant que tu bades ton foot si tard dans la nuit, c’est qui qui régale ta femme ?— (Thierry Pillon, Le Corps à l’ouvrage, Stock, 2012, page 95)
L’époux empoté, fortement épris de sa femme, ne savait que la bader.— (Rodolphe Meidinger et Kim Hyeong-jun, La Porte des secrets. Et autres contes libertins de Corée, Atelier des cahiers, 2015, page 141)
Enfin, il se décida et l’on réclama le grand silence. Aicard avait quitté sa fourchette, croisé ses bras sur son estomac et restait béat, « badait » par anticipation.— (Jean Aicard : du poème au roman, collectif, Université de Toulon et du Var, Edisud, 2000, page 125)
Assis dans le pré ou debout sur la place, les spectateurs, mâchant un chewing-gum ou suçant un bonbon, badaient la tête en l’air, attendaient avec curiosité le sifflement de départ de la prochaine fusée.— (Claude Brahic, Emma… fille des Cévennes, Tampere (Finlande), Atramenta, 2019, page 192)
(Midi de la France) Se promener sans but, flâner sans rien faire ou rêvasser en cas d’immobilité (verbe intransitif)[3][2].
(Limousin) Garder la bouche ouverte pour vider une partie du contenu de son estomac et attendre de recommencer, vomir.
Il doit avoir une gastro, il a badé toute la nuit.
Le petit João bade : « Je ne jouais plus et je n’avais plus de plaisir. J’ai voulu arrêter le football pour tenter un autre sport mais mon père m’a poussé à ne pas baisser les bras. »— (Nicolas Vilas, João Félix, aux origines d’un phénomène, RMC Sport, 12 avril 2019, )
Frédéric Godefroy, Dictionnaire de l’ancienne langue française et de tous ses dialectes du IXe au XVe siècle, édition de F. Vieweg, Paris, 1881–1902 → consulter cet ouvrage
↑Marc Brysbaert, Emmanuel Keuleers, Paweł Mandera et Michael Stevens, Woordenkennis van Nederlanders en Vlamingen anno 2013: Resultaten van het Groot Nationaal Onderzoek Taal, Université de Gand, 15 décembre 2013, 1266 p. →