strogner \stʁɔ.ɲe\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison)
Strogner, dans ce langage, c’est voler, mais pas voler ouvertement : c’est prendre par petites doses, subrepticement, c’est tricher, guetter l’occasion de s’approprier malignement des choses, et désormais Élise strogne sans cesse, elle strogne Désiré, elle strogne ses locataires, elle strogne Mlle Frida, jamais la maison de la rue de la Loi n’a bourdonné d’une vie aussi pleine, on entre, on sort, on boit, on mange, on crie, Élise se dépense sans compter, sans regarder à sa peine, sans s’inquiéter de ses reins ou de son ventre, parce qu’à chaque instant elle strogne, c’est perpétuellement de l’argent qu’elle prend à l’un ou à l’autre et qu’elle glisse dans la poche de son jupon de dessous ou dans la soupière à fleurs roses avant d’aller le porter, le jeudi après-midi, à la Caisse d’épargne, sur le livret de Roger.— (Simenon, Pedigree, 1943, deuxième partie, chapitre 11)