bréhaigne

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Voir aussi : brehaigne, brehaigné

Étymologie

(XIIIe siècle) De l’ancien français brehaing, brehaigne (« stérile »)[1], attesté sous la forme baraigne dans le Livre des Créatures (1119) de Philippe de Thaon. En ancien français, le mot était masculin ou féminin, mais seul le féminin a perduré. L’étymon est un radical prélatin. Plusieurs hypothèses sont proposées :
  • Le Trésor de la Langue Française informatisé[1] propose un radical *bar- (« infertilité ») avec une finale -aigne qui représenterait le suffixe -aneus (→ voir montain et montagne). Ce dictionnaire rejette les hypothèses d’étymon germanique faites par Gamillscheg, et celle de l’étymon latin vorago faite par Garcia de Diego[1]. Selon Gustav Körting[2] cet étymon est le vieux haut allemand bar (« nu, dépouillé ») qui donne bar en allemand, bare (« nu ») ou même barren (« stérile ») en anglais.
  • Alternativement, Körting[2] et Diez[3] proposent comme étymon le latin baro, baronis (« lourdaud, homme »), une jument brehaigne est « masculinisée » (voir citation ci-dessous), une femme bréhaigne est une virago, une hommasse.
  • Pour Oscar Bloch et Walther von Wartburg, l’étymon est *barañ, apparenté à l’albanais beronjë (« femme stérile »).
  • Pierre Gastal propose le gaulois *bregano (« stérile »), qu’il base sur le breton brec’hagn (« stérile »). Il l’apparente à l’ancien français meshain, meshaigne (« mutilation, estropiement », « mutilé »).
Le sens de « bohémien » que l’on trouve chez Victor Hugo ne se retrouve nulle part ailleurs.

Adjectif

Singulier Pluriel
bréhaigne bréhaignes
\bʁe.ɛɲ\

bréhaigne \bʁe.ɛɲ\ féminin Note : Semble être inusité au masculin.

  1. Stérile, en parlant des femelles de certains animaux.
  2. (Spécialement) Qualifie un poisson qui n’a ni œufs ni laitance.
    • Duhamel pense aussi que les carpes qu’on nomme bréhaignes ne sont point des mulets, mais des poissons qui, dans certaines circonstances, sont dépourvus de laitance et d’œufs. — (Exposé succinct des principales observations faites jusqu’à ce jour sur les maladies et sur les anomalies des poissons, par P. Rayer, dans Archives de médecine comparée, Paris : chez J.-B. Baillière, 1843, volume 1, page 305)
  3. (Par extension) (Souvent ironique) Stérile, en parlant d’une femme.
    • Elle meublait de menues pratiques pieuses sa monotone vie déçue, et, bréhaigne, donnait à l’idéal les soins que ne réclamait d’elle aucun enfant. — (André Gide, Les Caves du Vatican, 1914)
    • 20 avril 43 – Il y a parfois dans les familles de ces cousines bréhaignes, providence des veufs et cerbères de logis qui ne leur appartiennent jamais que par accident. — (Benoîte et Flora Groult, Journal à quatre mains, Denoël, 1962, page 274)
    • Cette prouesse médicale se payait cependant au prix fort : Marguerite n’aurait plus jamais d’enfant. Sous le coup de la déception, Lucien n’avait pas trouvé les mots qui auraient pu apaiser le chagrin de Marguerite, devenue bréhaigne à vingt ans. — (Jean-Max Tixier, Le Maître des roseaux, 2003, Terres de France)
    • Je vous parie une vache pleine contre une dame bréhaigne qu’il se prépare des choses pas décorticables pour bientôt ! — (San-Antonio, Béru-Béru, Éditions Fleuve noir, 1970, chapitre 12)
  4. (Par extension) Qui est stérile, ne contient aucune vie.
    • Tout est déréglé, la nature (la mer devient bréhaigne), les lois (il n’est plus permis de porter secours), la famille (le conseil des anciens n'est plus écouté), et l'ordre ancien ne reviendra jamais. — (Le Monde, 13 mars 2012)
      • Ce n’est point cependant une terre bréhaigne, puisque ses enfants se comptent par millions, et si cette mère n’a pas de lait our ses petits, du moins l’aiment-ils passionnément. — (Jules Verne, P’tit Bonhomme, chapitre 1, J. Hetzel et Cie, Paris, Illustrations par Léon Benett, 1891)
  5. Qui partage avec le cheval certaines caractéristiques, en parlant de la jument.
  6. (Hapax) Bohémien.
    • À l’avant, sur un strapontin adhérent au fourgon et ayant pour porte la fenêtre, au-dessus de la croupe des chevaux, à côté d’un vieillard qui tenait les guides et dirigeait l’attelage, deux femmes bréhaignes, c’est-à-dire bohémiennes, vêtues en déesses, sonnaient de la trompette. L’ébahissement des bourgeois contemplait et commentait cette machine, fièrement cahotante. — (Victor Hugo, L’Homme qui rit, 1869)

Variantes

Traductions

Nom commun

Singulier Pluriel
bréhaigne bréhaignes
\bʁe.ɛɲ\

bréhaigne \bʁe.ɛɲ\ féminin

  1. Femelle stérile.
    • Et d’ajouter aussi que c’est une vielle biche : la bréhaigne, laquelle ne peut plus se reproduire qui régule la harde. — (La Dépêche, 23 septembre 2012)
  2. (Vieilli) Femme stérile.
    Note : Après le XVIe siècle, le terme devient injurieux lorsque l’on l’utilise pour une femme humaine[4].
    • Celles qu’on reconnaît stériles ne sont employées qu’a servir ; et, des hommes impuissants, se font esclaves, qui se peuvent mêler charnellement avec les bréhaignes. — (Savinien Cyrano de Bergerac, Les États et empires de la lune et du soleil, Honoré Champion, Paris, 2004, ISBN 2-7453-1079-8, page 336)
  3. (Hapax) Bohémienne.
    • Ces deux bréhaignes, ramassées par le philosophe dans le pêle-mêle nomade des bourgs et faubourgs, étaient laides et jeunes, et s’appelaient, par la volonté d’Ursus, l’une Phœbé et l’autre Vénus. — (Victor Hugo, L’Homme qui rit, 1868)

Traductions

Adverbe

Singulier Pluriel
bréhaigne bréhaignes
\bʁe.ɛɲ\

bréhaigne \bʁe.ɛɲ\

  1. (Hapax) Bohémien.
    • Vinos et Fibi partageaient le repas, mais gênaient peu. Ces deux vagabondes, à demi sauvages et restées effarées, parlaient bréhaigne entre elles. — (Victor Hugo, L’Homme qui rit, 1868)

Prononciation

  • La prononciation \bʁe.ɛɲ\ rime avec les mots qui finissent en \ɛɲ\.
  • \bʁe.ɛɲ\ ou \bʁe.ɛnj\ selon Alain Lerond[5] non suivi par le Nouveau Petit Robert ni par le Trésor de la Langue Française informatisé.
  • France (Lyon) : écouter « bréhaigne  »
  • France (Toulouse) : écouter « bréhaigne  »
  • Lyon (France) : écouter « bréhaigne  »

Anagrammes

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Références

Sources

  1. a b et c « bréhaigne », dans TLFi, Le Trésor de la langue française informatisé, 1971–1994 → consulter cet ouvrage
  2. a et b Gustav KörtingEtymologisches Wörterbuch der französischen Sprache, F. Schöningh, Paderborn, 1908 → consulter cet ouvrage
  3. « bréhaigne », dans Émile LittréDictionnaire de la langue française, 1872–1877 → consulter cet ouvrage
  4. Madeleine Alcover, note 3966 des États et empires du Soleil, dans Savinien Cyrano de Bergerac, Les États et empires de la lune et du soleil, Honoré Champion, Paris, 2004, ISBN 2-7453-1079-8, page 336
  5. Alain Lerond, Dictionnaire de la prononciation, Larousse, page 55, 1980

Bibliographie

      • "en ceci faisant grand tort à la bonne nature, laquelle ils pensent aujourd'hui être bréhaigne et infertile en bons esprits, et que dès le commencement elle a répandu toutes ses vertus sur les premiers hommes, sans avoir rien retenu en épargne pour donner comme mère très libérale à ses enfants, qui devaient naître après au monde par le cours de tant de siècles à venir." — (Pierre de Ronsard, Abrégé de l'Art poétique français, 1565.)